Van Horne et le De ossibus de Galien

Antoine Drizenko

antoine.drizenko@univ-lille.fr

Université de Lille, HALMA UMR 8164

« Celui qui connaît bien l’ostéologie, connaît presque toute l’anatomie. En effet, il n’y a pas un muscle, un tendon, un ligament, un vaisseau ou un nerf qui, au contact de l’os n’y laisse une empreinte. »
Claude Libersa11. Professeur d’a (…) (1925-2014)

Ce travail est dédié à la mémoire de Danielle Gourevitch (1941-2021), décédée le 13 juin peu de temps avant que se tienne le colloque Van Horne.

C’est principalement en tant que professeur d’anatomie que j’aborderai la lecture de l’ouvrage concernant le De ossibus de Galien publié par Joannis van Horne en 166522. Galenus, De os (…) . Ma première quête de cet ouvrage devenu fort rare remonte au début des années 90 du vingtième siècle. Je m’étais alors passionné pour la controverse entre André Vésale (1514-1564) et Jacques Dubois, dit Sylvius (ca. 1489-1555) à propos de l’anatomie de Galien. C’est grâce à l’extrême amabilité des responsables de la bibliothèque du Muséum national d’histoire naturelle à Paris que j’ai pu obtenir une copie de l’unique exemplaire de cet ouvrage conservé dans une collection publique en France33. Bibliothèque d (…) . Il s’agit d’une sorte de « manuel » dont le format confirme le projet éditorial : un in-12°. Au verso de la page de titre figure la liste des traités contenus dans le livre, successivement : le texte grec du De ossibus de Galien colligé sur toutes les éditions disponibles et très amendé, accompagné d’une traduction latine ; des extraits de l’épitre [sur la racine de Chyne] de Vésale à Jacques Roelants ; des extraits des réfutations des calomnies d’un « vaesanus44. Jeu de mot int (…)  » envers Galien, de Sylvius ; de l’apologie de Vésale contre Sylvius de René Hener ; de l’Examen des os de Bartholomée Eustache ; de la Nature des os d’Hippocrate [texte grec et latin juxtalinéaire] ; du premier chapitre du huitième livre De la médecine de Celse. Dans les 12 pages préliminaires, il y a une lettre de dédicace adressée au recteur de l’université de Leyde Wilhelm van Straten55. Un portrait de (…) (1593-1681) et une lettre au Lecteur bienveillant. Les sept textes annoncés s’étendent sur 276 pages. Nous suivrons l’ordre proposé par l’auteur dans le déroulé de nos lectures.

La dédicace à Wilhelm van Straten

Cette « lettre ouverte » respecte les conventions du genre. Le latin y est à l’imitation des longues périodes de Cicéron et les épithètes y sont flatteuses. Les expressions néolatines sont élégantes. Par exemple : « cum sub praelo sudaret elegans Galeni de Ossibus libellus », que l’on peut tenter de rendre par : alors que l’élégant libelle Sur les os transpire sous la presse [de l’imprimeur]. Il est vrai que Vésale déjà en 1538 dans la dédicace de ses Tabulae Sex66. Voir Drizenko, (…) avait écrit plus simplement « rem praelo commisi » soit « j’ai confié la chose à la presse [de l’imprimeur] ». On y apprend successivement que Van Straten accourut (sic !) à la dissection d’une femme enceinte de quatre mois, entreprise par Van Horne, que Van Horne a eu Van Straten comme professeur à Utrecht et que celui-ci exhortait ses élèves à bien connaître l’ostéologie. Qu’il montrait à ses élèves, comme à l’école d’Alexandrie au temps de Galien, des squelettes de sa collection personnelle, parmi lesquels celui d’un bossu.

La lettre au lecteur bienveillant

L’adresse au lecteur commence par annoncer l’objectif de l’ouvrage : il faut débuter l’étude de l’anatomie par l’ostéologie, comme s’il s’agissait d’un abécédaire pour l’apprentissage de la lecture du corps humain. Dans cette démarche, les « antiquitati » sont des guides fiables, au premier rang desquels il faut placer Galien et son De ossibus ad tyrones – Des os, pour les débutants. Hélas, Van Horne fait le constat d’une pénurie en ce dernier tiers du xviie siècle. Aucune édition de cet ouvrage ne semble disponible, en tous cas pour ce qui est du texte grec, et Van Horne de signaler la carence du texte grec dans les deux éditions collectives de Galien : l’aldine de 152577. Galeni Libroru (…) et celle de Bâle, de 153888. Galeni Pergame (…) , dans laquelle ne figure que la traduction latine de Balamius récemment divulguée99. Édition la mêm (…) (1535). Il souligne les recherches pénibles et infructueuses de Vésale qui voulait accéder à un manuscrit grec pour parfaire sa contribution à l’édition collective latine des juntes par Montanus en 1541. Il est vrai que le célèbre et magnifique manuscrit dit « collection de Nikétas », acquis par Ianos Lascaris auprès de Niccolò di Giacomo, de Sienne à Candia en Crête le 3 avril 1492 pour le compte de Lorenzo de Médicis n’est réapparu qu’après la mort de Lascaris en 15341010. Sa bibliothèqu (…) . Il a servi à établir la traduction latine de Balamius qui était le médecin personnel du pape Clément VII et Lorenzo II de Medicis. De même, la copie qui en a été faite au xvie siècle, l’actuel manuscrit grec 2248 de la BnF et sa copie, le grec 2247, n’ont pu être consultées par Vésale1111. Voir à ce suje (…) en raison de la reprise des hostilités entre François Ier et Charles Quint ce qui l’a forcé à quitter Paris à la fin de 1536 et de la mauvaise grâce du Cardinal Rodolphi :

Surtout lorsque certains, peu soucieux de l'intérêt commun, ou bien jaloux, gardent si bien la copie grecque pour eux qu’aucun motif pour que cette dernière me fût confiée quelque temps en consultation n’a pu convaincre ceux qui, outre Balamius et le cardinal Rodolphus, reconnaissaient cependant l’avoir en leur possession, mais avec la condition de ne pas me la communiquer1212. De humani corp (…) .

Van Horne passe en revue les éditions successives du texte grec du De ossibus : la princeps due à Martin Grégoire à Paris en 15431313. Lien vers la n (…) , puis celle de John Caius à Bâle en 1555 [sic !, pour 15571414. En ligne : htt (…) ], celle de Salomon Alberti à Wittenberg en 1578 [recte : 15791515. En ligne : htt (…) ], celle, posthume, de Jean Ingrassia avec ses commentaires à Palerme en 16031616. En ligne : htt (…) pour finir avec celle de Caspar Hoffmann, gréco-latine, chez Wechel à Francfort en 16301717. En ligne : htt (…) . Van Horne déclare qu’il a eu en main ces différentes éditions. Il faut toutefois relever les erreurs de dates qu’il donne pour les éditions de Caius et d’Alberti. Le plus probable est qu’il faut s’en tenir à ce qui est écrit sur la page de titre du livre de Van Horne : font partie de sa bibliothèque personnelle les livres de Vésale, de Sylvius, d’Hener et d’Eustache dont il réimprime des extraits. Il faut ajouter très certainement le De ossibus d’Hoffmann auquel il emprunte probablement les textes grec et latin de Galien, tant il puise dans les notes de cet ouvrage. Vient alors le tour de l’énoncé des titres des livres dont Van Horne donnera des extraits. Nous en avons déjà donné la liste puisqu’elle figure dans la table des matières, au verso de la page de titre. La lettre s’achève par le souhait que le lecteur fasse bon usage du recueil ainsi constitué.

Après la lettre au lecteur bienveillant

Il y a une page de titre qui reprend l’annonce des textes grec et latin du De ossibus de Galien, la même marque d’imprimeur, la même adresse et la même année, 1665, que sur la page de titre principale. Comme elle est située en tête d’un cahier numéroté A tandis que les signatures du cahier des feuillets liminaires sont marquées – jusqu’à – 4, peut-être l’imprimeur s’est-il ainsi donné la possibilité de vendre séparément le texte gréco-latin du De ossibus. Ce texte est disposé en juxtalinéaire : la page de gauche présente le texte grec, et celle de droite, « la belle page », le texte latin. Van Horne avait annoncé cette disposition dans sa lettre au lecteur bienveillant en soulignant tout l’intérêt qu’il y avait à ce que le texte latin corresponde «ἐϰ διαμέτρου » – ek diametrou – au texte grec. Le vocabulaire anatomique latin correspondant au grec en vis-à-vis serait ainsi mieux appris. Cette mise en page est admirablement exécutée, le format du livre d’ailleurs la favorise, si on la compare à celle de Wechel en deux colonnes par page pour Hoffmann, le texte grec empiétant sur la colonne du latin et réciproquement presque à chaque page.

Le texte grec du De ossibus donné par Van Horne est conforme aux meilleures sources disponibles à l’époque. Le très beau manuscrit de Florence Pluteus 77, 4 est en effet, le modèle de toutes les éditions du xvi et du xviisiècle. Il faudra attendre le xxe siècle pour la mise à profit des manuscrits de l’Escorial, de Grottaferrata et de Paris (le suppl. gr.  24, du xiie siècle apporté par Mynoïde Mynas1818. Par exemple, d (…) ). On lit de nos jours le texte grec du De ossibus dans l’édition critique d’Ivan Garofalo parue aux Belles Lettres à Paris en 2005 dans la célèbre collection des « Budés » grecs1919. Galien, Œuvres (…) .

La traduction latine de Balamius est sans cesse reprise de sa parution en 1535 à l’édition de Hoffmann en 16302020. Garofalo, dans (…) .

Les notes de Van Horne s’étendent de la page 98 à la page 115 qui est complétée par quatre errata pour le texte grec. Il s’agit d’une paraphrase, parfois abrégée, des notes données par Hoffmann.

Après cela, Van Horne propose un choix de controverses à propos du De ossibus. Il commence par Vésale dont il donne, de la page 116 à la page 131, un extrait de la lettre sur la racine de Chyne de 15462121. On peut lire l (…) . Suit le texte de Sylvius2222. Vaesani cujusd (…) de la page 131 à la page 162. Ce premier ensemble est le noyau à partir duquel la controverse est née au xvie siècle. Vésale a suivi les cours de Sylvius à Paris entre 1533 et 1536. Dans la Fabrica parue en 1542, à de nombreuses reprises, Vésale remet en cause les descriptions de Galien. Il précise que Galien n’a pas, ou très peu, disséqué de corps humain mais des animaux tels le porc et le singe et que chez l’Homme ses descriptions ne sont pas extrapolables. Sylvius se montre très mécontent. Rien, à ses yeux, ne doit attenter à la réputation de Galien. On sait par Vésale qu’il y a eu des échanges épistolaires en les deux protagonistes et que cela n’a rien résolu. Vésale saisit l’occasion de la publication de sa lettre sur la racine de Chyne en 1546 pour exposer son point de vue et Sylvius répond par la publication de son pamphlet en 1551. Dès lors, aucune conciliation n’est plus possible, les positions s’étant radicalisées. La controverse s’étend, untel prenant fait et cause pour Vésale, un autre pour Sylvius. Pour donner une idée de la violence des paroles, je donne en annexe 1 ma traduction de la lettre au lecteur honnête et pieux que Sylvius fait figurer en tête de son pamphlet. Dans les passages plus techniques, la violence des propos transparaît moins. En annexe 2 je donne ma traduction de la réfutation de la première calomnie par Sylvius. Le texte latin s’étend de la page 131 ligne 19 à la page 133, ligne 3 dans le De ossibus de Van Horne. Après avoir donné ces extraits de Vésale et de Sylvius, Van Horne cite la contribution de René Hener2323. Aduersus Iacob (…) qui prend parti en faveur de Vésale. Vient ensuite, de la page 197 à la page 257, toujours à l’appui de Vésale, l’Examen des os de Bartholomée Eustache2424. Bartholomaei E (…) . Il y déclare tout de go que Galien n’a jamais disséqué d’homme : « Ut enim suadeant omnibus, Galenum Homines nunquam secuisse, Hominisque fabricam minime descripsisse, ex iis, quae ab illo aut narrantur, aut silento praetermittuntur2525. Van Horne, De  (…) . » Le livre s’achève sur le texte d’Hippocrate, Nature des os, présenté sous forme bilingue juxtalinéaire sur deux pages en vis-à-vis, comme le De ossibus de Galien au début du livre, et par le premier chapitre du livre VIII de De medicina de Celse qui s’étend de la page 266 à la page 276.

En commençant à parcourir le De ossibus de Van Horne, j’ai précisé que je le ferai principalement en tant que professeur d’anatomie. Au moment de conclure, je me trouve, sur bien des points, en accord avec Van Horne. Comme lui, j’ai appris de mon premier Maître l’importance primordiale à accorder à l’étude de l’ostéologie dans les études anatomiques. J’ai d’ailleurs donné en exergue la phrase qu’il aimait à répéter à ce sujet. Si, maintenant, j’essaye de comprendre les autres motivations de Van Horne pour rééditer ces textes anciens, je dirai qu’il est commode pour un enseignant de pouvoir s’appuyer sur des écrits auxquels renvoyer les étudiants en quête de précisions. D’ailleurs, le grand Vésale lui-même, quand il se mit à enseigner, a publié une version remaniée du livre de son Maître Guenther d’Andernach2626. Institutionum (…) qu’il recommandait comme texte complémentaire à ses Tabulae Sex2727. Vesalii, Andre (…) . Van Horne à l’occasion de la publication de son De ossibus montre qu’il a une bonne maîtrise du grec et que son latin est d’une haute tenue, toutes qualités qui font de plus en plus défaut, à mon grand regret, à mes jeunes collègues.

Annexe 1 : Traduction de la lettre au lecteur honnête et pieux que Sylvius place en tête de son pamphlet2828. On en trouvera (…) .

« Bien que je fusse convaincu de la perfection complète de ces plus grandes divinités médicales après Apollon et Esculape, le divin Hippocrate et son admirable interprète, Galien, et de la vérité absolue de leurs écrits sur la physiologie et les autres branches de la médecine, j'ai entendu dire qu'un certain déserteur fou, totalement arrogant et totalement ignorant, lançait injustement les plus vaines calomnies contre leur physiologie. Aussi, comme il convient à un disciple pieux, je n'ai rien négligé pour les libérer, non seulement de tout signe, mais même du soupçon d'ignorance. Il me semble que j'ai réussi dans cette entreprise, tant par ces réfutations des calomnies, que par mes annotations sur les livres De Usu Partium. Ainsi, le pieux lecteur comprendra clairement que ce calomniateur a méchamment renoncé à son allégeance au serment du maître Hippocrate, dans lequel il promettait la plus grande gratitude à ses précepteurs et à leurs enfants ; et de plus, il a saisi toutes les occasions de les censurer faussement, puisqu'il espérait être pris en compte dans le temps comme quelqu'un, en disputant l'anatomie avec de si grands précepteurs, et en rivalisant avec eux pour le poste de chef. Cependant, il aurait été beaucoup plus juste en les excusant, s'il y avait un point particulier dans lequel ils semblaient avoir erré, soit en omettant quelque chose qui existe dans les corps de cet âge, soit en décrivant quelques choses qui leur font défaut. De cette manière, il n'aurait pas sollicité le titre d'impiété, toujours le plus odieux aux dieux et aux hommes, ni représenté le comble de l'ignominie, en laissant de côté des accusations plus graves. Au contraire, méritant le respect des médecins, il pourrait espérer autant de reconnaissance et de gloire que nous en attendons de vous, honnêtes lecteurs, pour nous consoler à l'avenir des charges d'injures portées contre nous, par pure autodéfense, par ce calomniateur mal embouché qui est condamné à la fois par la raison et par les témoins. Cependant, je ne me soucie pas plus des paroles futiles lancées par un homme insensé que de l'aumône qui m'est lancée par une femme ou par un petit enfant. C'est pourquoi je suis bien décidé à ne jamais lui répondre. Je vous charge au contraire de juger entre nous, en vous fondant sur le récit de la nature, et sur les livres d'Hippocrate et de Galien, qui sont en parfait accord avec lui. Néanmoins, autant qu'il convient à des juges impartiaux, favorisez en pensée et en parole la cause tout à fait juste de vos précepteurs. Incité par la plus grande vénération pour ces précepteurs, et découragé par l'injustice de ces calomnies, j'ai peut-être écrit quelques critiques un peu vives au sujet de cet accusateur inepte ; si c'est le cas, attribuez-le entièrement à ma piété, et non à un désir inaccoutumé de ma part de proférer des injures. Dans ce livre, je réfute les calomnies, non pas au fur et à mesure qu'elles me viennent à l'esprit et parviennent ainsi à ma plume, mais en suivant l'ordre des Eisagoges Anatomicae que nous avons écrites. En les réfutant à une autre occasion, dans nos annotations des livres De Partium Usu, j'ai suivi l'ordre des livres eux-mêmes, mais je n'ai pas pollué ce discours sacré par une quelconque mention de ce calomniateur. Dans ces deux ouvrages, je n'ai fait qu'effleurer certaines des erreurs les plus remarquables et les plus diffamatoires de ce calomniateur. Car se contenter de les citer toutes, est un travail infini et sans rapport avec l'instruction du pieux lecteur. Après que j'eus achevé ces travaux, Fuchs publia un épitomé anatomique2929. Le facsimile n (…) , choisi dans le vaste et vain farrago du calomniateur, et retenant ses calomnies ; par ce petit livre, il reconnaîtra clairement la réfutation de ces calomnies, et il se rendra enfin compte qu'après Hippocrate, Galien est le seul parent de l'anatomie et des autres branches de la médecine. Il en sera d'autant plus sûr qu'il choisira le reste de son épitomé (car il ne s'agit que des os et des muscles) dans la nature même, et non dans la saleté pleine d'erreurs du calomniateur, et si, comme nous le faisons quand nous écrivons, il se fie au jugement et au témoignage de ses propres sens. S'il s'applique à cette étude, sans s'attacher aux paroles de qui que ce soit, je suis certain qu'il proclamera aussitôt le calomniateur à la fois insolent et ignorant, et le vouera aux Furies pour avoir impudemment abusé de ses précepteurs par de faux revirements, et pour s'être opposé indistinctement à la vérité et à la nature. »

Annexe 2 : Traduction d’un extrait du vaesani cujusdam… de Sylvius, dans le De ossibus de Van Horne, page 131 ligne 19 à la page 133 ligne 3.

[Réfutation de la première calomnie]

« Le livre entier sur l'ostéologie de Galien est en accord exact avec les os de l'homme, et a été écrit uniquement à leur sujet, comme cela sera très clairement évident pour quiconque comparera le squelette d'un homme avec les déclarations de Galien. Cependant, en partie, plusieurs de ses descriptions conviennent aux os d'animaux semblables à l'homme, principalement le singe. Mais ces descriptions n'ont pas été écrites sur les os de l'homme et du singe en commun, de sorte que certains de ses propos s'accordent avec les os de l'homme, et d'autres avec ceux du singe. Chacun doit se rendre compte que cela ne serait pas moins absurde et grotesque que si quelqu'un attachait une tête humaine au cou d'un singe. En effet, bien que les os du singe soient en accord avec les nôtres en ce qui concerne le nombre, la taille, la forme et la position finale, presque tous les os individuels sont très différents, comme le montre plus clairement que la lumière du midi quiconque compare le squelette d'un homme avec celui d'un singe. Dans nos commentaires sur le livre de Galien sur l'ostéologie, nous avons clairement expliqué certaines de ces différences entre les os de l'homme et ceux du singe. C'est pourquoi le calomniateur suppose faussement que l'ostéologie de Galien a été écrite sur l'homme et le singe en commun ; à l'appui de sa croyance, il cite ces paroles de Galien :

Celui qui doit comprendre ces commentaires ou les nôtres, doit bien connaître notre livre sur l'ostéologie, et avoir examiné les os du squelette d'un homme, sinon d'un homme, du moins d'un singe.

Ce que Galien veut dire par ces mots, c'est que les os d'un homme doivent être examinés en relation avec son livre sur l'ostéologie, afin de clarifier le discours et de montrer son exactitude. Mais si ces os ne sont pas disponibles, il faut au moins leur substituer ceux d'un singe, qui sont très semblables aux os humains. »

1.

Professeur d’anatomie à Lille. C’est de sa bouche même que j’ai pu recueillir la phrase citée en exergue de ce travail.

2.

Galenus, De ossibus Graecè & Latinè. Accedunt Vesalii, Sylvii, Heneri, Eustachii, ad Galeni doctrinam exercitationes. Ex bibliotheca Joannis van Horne. Lugduni Batavorum, apud Danielem vander Boxe, 1665.

3.

Bibliothèque du Muséum national d’histoire naturelle, cote 8o Res 656 (Anc. 4056).

4.

Jeu de mot intraduisible sur Vesalius / Vaesanus, c’est-à-dire : qui n’est pas dans son bon sens, qui extravague, insensé, fou.

5.

Un portrait de Van Straten peut être vu à l’adresse suivante : https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Willem_van_der_Straten.jpg (consulté le 29 août 2022).

6.

Voir Drizenko, Antoine, Traduction et commentaires des six planches anatomiques d'André Vésale (1538). Thèse de doctorat, médecine, Lille 2, 1983.

7.

Galeni Librorum pars prima [-quinta], Venise, Aldus et A. Asulanus, 1525.

8.

Galeni Pergameni svmmi semper viri qviqve primvs artem medicinae vniversam ... Opera omnia, ad fidem complurium & perquam uetustorum exemplariorum ita emendata atque restituta, ut nunc primum nata, atque in lucem aedita, uideri possint ... Galenou apanta, 5 vol. in fol., Bâle, 1538.

9.

Édition la même année à Rome, chez Antonio Blado : https://www.digitale-sammlungen.de/en/view/bsb10150747?page=4,5 ; à Lyon, chez Melchior et Gaspar Trechsel et enfin, à Paris chez Christian Wechel, cette édition est consultable à la BIU Santé médecine, cote 6896 (2).

10.

Sa bibliothèque est acquise par le cardinal Niccolò Ridolfi à la suite d’un prêt contracté par Janus Lascaris en 1525 et pour lequel le cardinal offre sa garantie, la bibliothèque de Lascaris servant de caution.

11.

Voir à ce sujet l’excellente contribution de Vons, Jacqueline, « André Vésale et le traité de Galien De ossibus traduit par F. Balamius », Lire les médecins grecs à la Renaissance, Paris : De Boccard, 2004, pp. 272-282 ; et celle non moins remarquable de Boudon-Millot, Véronique, « Vésale lecteur de Galien et d’Hippocrate », dans le même ouvrage, consultable à l’adresse suivante : https://www.biusante.parisdescartes.fr/ressources/pdf/histmed-vesale-actes2014-01boudon.pdf (consulté le 18 juillet 2022).

12.

De humani corporis fabrica I, 9. Cité par Véronique Boudon-Millot, art. cité, note 12.

13.

Lien vers la numérisation de l’exemplaire de la Bibliothèque universitaire de Gand : https://books.google.be/books?id=wIVEAAAAcAAJ (consulté le 18 juillet 2022).

17.

En ligne : http://resolver.sub.uni-goettingen.de/purl?PPN773860088 (consulté le 18 juillet 2022).

18.

Par exemple, dès la première page du texte grec donné par Van Horne, on relève à la ligne 14 la leçon « ὥστε οὔδὲ γνωρίξειν », leçon du manuscrit Plut. 74, 7 au lieu de « ὥστε οὔτε γνωρίξειν », leçon des autres manuscrits retenue par Garofalo dans son édition critique.

19.

Galien, Œuvres. Tome VII : Les Os pour les débutants – L'Anatomie des muscles, texte établi et annoté par Ivan Garofalo, Paris : Les Belles Lettres, 2005.

20.

Garofalo, dans la notice de son édition du De ossibus, à la page 33, donne la date de 1625 qui est en réalité celle du De usu partium du même Hoffmann. Ou encore, il omet de citer les éditions du texte grec du De ossibus par Salomon Alberti et Caspar Hoffmann à la page 30.

21.

On peut lire l’extrait donné par Van Horne à partir de la page 46 à la page 55 du texte de Vésale, en ligne à l’adresse suivante : https://www.biusante.parisdescartes.fr/histmed/medica/page?00154&p=45 (consulté le 18 juillet 2022). On peut aussi lire la traduction anglaise intégrale de ce livre de Vésale par Garrison, Daniel H., Vesalius: The China Root Epistle. A New Translation and Critical Edition, New-York : Cambridge University Press, 2005.

22.

Vaesani cujusdam [sc. Vesalii] calumniarum in Hippocratis Galenique rem anatomicam depulsio, Parrhisiis : Apud Catharinam Barbé viduam Jacobi Gazelli, 1551. La seconde édition, posthume, datée de 1556 est accessible en ligne à l’adresse : https://archive.org/details/b32982781 (consulté le 18 juillet 2022).

23.

Aduersus Iacobi Syluii depulsionum anatomicarum calumnias, pro Andrea Vesalio apologia In qua praecipuae totius negotij anatomici pene controuersiae breuiter explicantur. Renato Henero Lindoense medico authore. Additus & ipse Iacobi Syluij Depulsionum libellus, quo aequus lector commodius de omnibus iudicium ferre possit, Venise, Gualtiero Scoto, 1555, accessible en ligne à l’adresse : https://archive.org/details/bub_gb_7hTfUas3bxwC (consulté le 18 juillet 2022). Dans son livre, Hener donne à partir de la page 71 le texte du pamphlet de Sylvius.

24.

Bartholomaei Eustachij… Opuscula anatomica. Quorum numerum & argumenta auersa pagina indicabit, Venise, Vincent Luchinus, 1564, accessible en ligne à l’adresse : https://archive.org/details/ita-bnc-mag-00001022-001/page/166/mode/2up
L’extrait donné par Van Horne commence à la page 167, ligne 2.

25.

Van Horne, De ossibus, p. 197, ll. 21-25.

26.

Institutionum anatomicarum secundum Galeni sententiam ... libri quatuor ... / Ab Andrea Wesalio Bruxellensi, auctiores et emendatiores redditi, Venise, Bernardinus, 1538, accessible en ligne à l’adresse : https://archive.org/details/hin-wel-all-00001067-001 (consulté le 18 juillet 2022).

27.

Vesalii, Andreae, Tabulae Anatomicae Sex, Venetiis Imprimebat B. Vitalis, Venetus, sumptibus Ioannis Stephani Calcarensis M·D·XXXVIII. Facsimile accessible en ligne à l’adresse : https://archive.org/details/BIUSante_02012 (consulté le 18 juillet 2022).

28.

On en trouvera le texte latin à l’adresse suivante : https://archive.org/details/b32982781/page/4/mode/2up (consulté le 18 juillet 2022).

29.

Le facsimile numérique est accessible à l’adresse suivante : https://www.digitale-sammlungen.de/view/bsb10172817?page=1 (consulté le 18 juillet 2022).